SCULPTURE ET POESIE |
L'IDEAL DES BOUFFONS L'idéal c'est l'argent amassé sans sueur C'est le fric des rentiers sans parfum ni saveur Sans effort à la bourse il suffit de semer L'oseille fructifie même quand vous dormez Idéal ces forçats trimant pour presque rien Hommes femmes et enfants d'un monde si lointain Fabricant des gadgets pour vaincre notre ennui Modernisme archaïque assassin d''utopie Idéal raffiné de bouffons qui hallucinent Entre Mur de Berlin et Muraille de Chine Affament les fauchés pour doper la croissance Et gave les nantis des fruits de la finance L'idéal ces grands yachts hauts de plusieurs étages Des palaces flottants un luxe d'un autre age A bord les milliardaires invitent leurs valets Pour des vacances à l’œil aux frais des affamés L'idéal un 4 x 4 une grande villa La piscine au jardin, au salon l'écran plat Frigo américain qui vous tend les glaçons Appart du bord de mer dans des tours de béton Riches petits et grands dans un même combat Celui du toujours plus et du toujours pour soi Oublié l'idéal englué dans les sous Réveille toi Jaurès ils sont devenus fous! | L'ÎLE DESERTE C'est sur l'île déserte que je t'ai rencontrée Un soir dans un bistrot au milieu des fumées Ma galère échouée dans ton port solitaire J'ai vécu des années le paradis sur terre Et je me suis nourri de tes fruits défendus On ne m'a pas chassé personne ne m'a vu La douceur de ta peau la chaleur de ton rire Ont gravé dans ma tête le meilleur souvenir Mais sur l'île déserte on ne fait que passer J'ai repris mon parcours et longtemps j'ai ramé A l'ombre des platanes j'ai rangé mon bateau Parmi les milliers d'autres amarrés aux anneaux Le quotidien m'a pris et souvent il me pèse Mais tu vois je m'y fais et c'est bien là le piège Parfois quand c'est trop fort que la corde m'étouffe Je pense à toi là bas pour reprendre mon souffle Et je rêve qu'un jour quand tout s'endormira Lentement sans un bruit je partirai vers toi Te cherchant sans relâche au milieu des fumées Sur cette île déserte si dure à retrouver |
BLEU Les bleuets des chemins avec le bleu du ciel Au sein du Lauragais, d'une enfance de miel Puis le bleu de la mer, découverte ébahie Et le bleus des marins, sous les pompons rubis. Couleur bleu indigo, chez nous bleu du Pastel, Au pays de Cocagne, l'or qui a comblé un siècle. On y lit son histoire sur ses beaux monuments Qui font vivre le rêve d'un bleu au firmament. Ce bleu si délicat des vitraux des églises Pour les maîtres verriers un secret d'alchimiste Créant une lumière émanant du céleste, Le bleu des cathédrales, au paradis terrestre. Puis les bleus de la vie, enfants de la rancoeur Ceux qui marquent les corps et qui blessent les coeurs La douceur si tranquille du regard de mon père Entre le bleu du ciel et le bleu de la mer. Les yeux de mon amie qui scintillent dans l'ombre, Perles de pur saphir sous chevelure blonde, Un cadeau de la vie qui enflamme ma plume. C'est le bleu du bonheur, celui des vraies fortunes. | DU ROUGE ET DU NOIR Manteau rouge, mini-jupe et collants noirs La jeune étudiante a rendez vous ce soir Aujourd'hui c'est Pierre, elle le connaît bien La soixantaine, veuf, genre français moyen La voilà chez le loup, il ouvre et lui sourit Petit Chaperon Rouge enlève ses habits Pierre est un homme doux, tendre, plein d'attention Ce serait même bien, mais son cœur dit que non Comme deux vieux amis, ils se disent au-revoir L'enveloppe blanche près du sac à main noir Elle ne vérifie plus, jamais aucun problème Le campus, sa chambre, le portable qui sonne Maman! Oui tout va bien, la nourriture est bonne Pas de soucis ma petite Maman, je t'aime! |
LE POETE EST VIVANT Ils ont voulu tuer le poète Son corps s'est effondré, la face contre terre On les a vu les loups, s'abreuver de son sang Rouge le caniveau, le poète est vivant Comme la fleur renaît aux pieds des barbelés Le poète insolent ne se taira jamais Liberté attaquée par tant de dictateurs Tu engendres le poète, le génie créateur Le poète est d'ici, du monde des vivants Il est la voix des hommes qui relèvent le gant A l'égal du roseau, il plie mais ne rompt pas La violence et la mort ne l'arrêteront pas Etoile dans les nuits de millions d'opprimés Etincelle d'espoir pour ces vies malmenées La fougue du poète traverse le béton Et sape peu à peu le mur de la prison | CAMILLE Ses petits doigts d'enfant domptent déjà la terre Dans ses mains agiles elle devient mystère Sauvageonne fière, aînée de la fratrie Si près de son frère, dans son art lui aussi Camille la beauté Camille liberté Le couple fraternel, celui de l'impossible Un couple passionnel, l'amant inaccessible Camille le talent Le talent insolent Connectée au génie, devant si peu à l'autre Le maître adoré dont elle fut l'apôtre Camille la blessée, une femme offensée Un être fascinant toujours trop dans l'excès Sa mère le rejet, les cris au sacrilège Son père qui l'admire, l'aime et la protège Le frère effrayé des frasques de sa sœur L'artiste et ses démons, comme un révélateur Fuit au bout du monde, troublé par ce tracas Camille suppliant qu'il la sorte de là Vidée de tout son art, par ses proches internée Inquiets et trop craintifs de l'ivre liberté Ignorant sa douleur ses larmes et ses cris Alors qu'elle disparaît dans le froid de sa nuit Une légende, une femme, une artiste Camille poursuivie par son destin si triste Sans doute la rançon d'un merveilleux génie L'œuvre lumineuse, pour le prix de sa vie |